Ingénieur des arts et manufactures, conseiller municipal d'Alep. Charles Godard est né en février 1899 à Paris. En 1917, il est reçu à l'École centrale des arts et manufactures, avant d'être mobilisé. Rapidement rendu à la vie civile, il achève sa formation d'ingénieur. En 1920-1921, il termine son service militaire comme officier instructeur à l'École d'application d'artillerie de Fontainebleau. Il débute ensuite sa carrière aux Chemins de fer du Maroc, avant d'entrer, en 1925, au chemin de fer de Dakar à Saint-Louis. En 1933, Charles Godard quitte le Sénégal pour rejoindre la Compagnie du chemin de fer de Damas-Hama et Prolongements (DHP), qui exploite diverses lignes en Syrie et au Liban. En 1934, il part pour Alep. En 1939, capitaine de réserve d'artillerie coloniale, il est affecté à l'état-major du général Weygand, commandant en chef de l'Armée d'Orient, en qualité de spécialiste des transports, ce qui le conduit à effectuer plusieurs missions officielles en Turquie. Dès l'armistice de juin 1940, il manifeste ses sentiments anti-allemands. Il profite alors de ses contacts antérieurs avec les autorités britanniques pour leur fournir des renseignements par le biais de leurs services consulaires d'Alep, puis, après la fermeture des consulats anglais, par l'entremise du consulat américain. En juillet 1941, après le passage du Levant sous contrôle gaulliste, Charles Godard rejoint la France libre, alors que la convention de Saint-Jean d'Acre autorise les civils français à demeurer au Levant sans prendre parti. En 1942, il est de retour à Beyrouth, comme directeur adjoint de la Compagnie du chemin de fer DHP et apporte sa contribution à l'effort de guerre en fournissant des études à l'état-major britannique du Caire. Le 25 mai 1943, il adhère à l'Union des ingénieurs et techniciens de la France combattante. De mai à décembre 1945, il entreprend la rédaction d'un ouvrage, resté inédit, qui relate les événements survenus dans les pays sous mandat français au Levant, intitulé "Au Levant de 1939 à 1946", et rentre en France en 1946 pour commencer une carrière de directeur technico-commercial chez De Dietrich, société de matériel ferroviaire, jusqu'à sa retraite en 1966. Il décède en 1978.
Article de Frantz Malassis dans La Lettre de la Fondation de la Résistance, n° 78 (septembre 2014).
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Alep, essai de géographie urbaine et d'économie politique et sociale
Année : 1938 20 x 31 cm, 103 pages dactylographiées , comporatnat 6 cartes, 3 graphiques, 17 photographies Imprimerie : Alep, Imprimerie Rotos, place Gouraud
Introduction de l'auteur
La ville d'Alep la grande cité du Plateau Syrien, a été l'objet de nombreuses études, principalement au point de vue archéologique et historique. Parmi ces documents, je citerai le livre de Monsieur Paul Baurain, un français admirateur d’Alep, livre qui est intitulé : ALEP-AUTREFOIS-AUJOURD'HUI (1). Cet ouvrage constitue une synthèse remarquable de la vie de cette grande agglomération et il peut être considéré comme un des exposes les plus succincts et les plus complets qui aient été rédigés sur Alep, principalement au point de vue archéologique, historique et artistique. Mais les problèmes d'urbanisme n'ont pas été étudiés de manière objective et je désire combler cette lacune, ce qui permettra de connaitre dans tous ses détails la capitale du Nord Syrien. Investi, par la confiance du Gouvernement Syrien, du poste de Conseiller Municipal, j'ai porté un vif intérêt à tous les problèmes urbains et quoique Alépin depuis peu de temps, j'ai ressenti vivement le désir d'améliorer, dans la mesure de mes moyens, les conditions de vie et de bien être de cette importante population. Je dois, par ailleurs, acquitter un tribut de reconnaissance à la Ville d’Alep, où j'ai rencontré dans tous les milieux un accueil, non seulement courtois, mais aussi amical, ce qui m'a permis de trouver loin de ma Patrie un nouveau foyer, auquel je me suis peu à peu attaché. Je serai heureux si cette étude peut faire progresser les institutions alépines et mon but aura été atteint. La géographie urbaine consiste à étudier les modes de développement d'une ville, selon les circonstances et les conditions de l'activité humaine. L'Économie politique Permet de se rendre compte de la production, de la répartition et de la consommation des richesses, en fonction du milieu dans lequel se développe cette organisation. L'Économie Sociale représente l'étude de l'ensemble des lois et des nécessités qui régissent une communauté humaine. Il est intéressant d'étudier la ville d'Alep sous ces trois angles et c'est le but de cet essai. Je tiens à souligner que de grands progrès ont été effectués à Alep depuis la guerre 1914-1916, grâce à l'étroite collaboration amicale et confiante de la France et de la Syrie et je ne puis que souhaiter que la grande cité du Nord Syrien, cité plusieurs fois millénaire, puisse encore accroitre son développement par le resserrement des liens des deux Nations , Amies et Alliées, la Syrie et la France . Enfin je remercie vivement Mr. Demeulenaere, Inspecteur Général de la Municipalité et Mr. Prahin, Ingénieur en Chef, pour leur bienveillance et pour le concours qu'ils m'ont apporté. Alep - novembre 1938
(1) Baurain – Alep-Autrefois-Aujourd’hui – Imprimerie Maronite Alep 1930
Table des matières
INTRODUCTION 1 CHAPITRE I POSITION D'ALEP DANS LE MONDE 3 - Généralités sur la ville d'Alep CHAPITRE II LE TRACE DE LA VILLE D'ALEP 8 - Son extension CHAPITRE III LES DIVERS QUARTIERS DE LA VILLE D'ALEP 12 CHAPITRE IV LES SERVICES PUBLICS D'INTÉRÊT GENERAL 24 CHAPITRE V L’ORGANISATION MUNICIPALE 30 CHAPITRE VI LES SERVICES PUBLICS D'INTÉRÊT MUNICIPAL 34 - Les services gérés par la municipalité CHAPITRE VI LES SERVI CES PUBLICS D’INTÉRÊT MUNICIPAL 50 - Les services concédés CHAPITRE VIII LES FINANCES MUNICIPALES 73 CHAPITRE IX LA. VIE SOCIALE 87 CHAPITRE X LES ORGANISATIONS SOCIALE 93 - L'assistance publique et municipale - Les établissements d'enseignement CHAPITRE XI L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE 97 CONCLUSION 102
Extraits
Pages 6-7
Population La ville d'Alep compte actuellement 300.000 habitants, parmi lesquels 180.000 musulmans environ, 120.000 chrétiens et israélites. On peut difficilement; en l’état actuel des institutions, connaitre exactement l'importance des diverses communautés religieuses. Toutefois, on indique approximativement l'existence à Alep des populations suivantes :
Musulmans sunnites |
165.000 |
Musulmans chiites |
15.000 |
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Total : 180.000 |
Maronites |
3.000 |
Grecs catholiques |
8.000 |
Arméniens catholiques |
12.000 |
Syriens catholiques |
5.000 |
Grecs orthodoxes |
3.000 |
Syriens orthodoxes |
7.000 |
Arméniens orthodoxes |
65.000 |
Israélites |
13.000 |
Protestants |
1.500 |
Latins |
1.000 |
Chaldéens |
1.500 |
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Total : 120.000 |
On constate l'extrême diversité des religions existant à Alep, ce qui n'est pas sans compliquer certains problèmes puisque l’état d'esprit d'un grand nombre de syriens consiste à considérer uniquement la question religion à l'exclusion de toute autre idée nationale ou locale.
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Nous resterons toujours sur la rive gauche du Koueik, et nous devons signaler le prodigieux développement vers le Nord du quartier des Réfugiés Arméniens. Dans la direction de la Rue Tellal, prolongée par la rue Souleymanié, il s'est construit une cité nouvelle comportant les quartiers Nayal, Souleymanié, El Ram, Djabrié et le quartier Meydan. Raconter l'histoire du développement de ces quartiers, c’est dire les qualités du peuple arménien, qui, sous la protection des drapeaux syrien et français a retrouvé une patrie. Les maisons en tôle de bidons à pétrole et les baraquements en bois et carton ont fait place aux maisons en briques de terre sèche, qui, elles-mêmes, sont remplacées peu à peu par des immeubles en pierre d'Alep. L’incroyable vitalité de cette population, soumise depuis la guerre à de nombreuses vicissitudes a permis l'extension de la ville d'Alep dans des conditions impossibles à prévoir. Et au-delà du Tour de Ville sur la route d'Ain Tell, au-delà du Lazaret, à la limite du périmètre municipal, un nouveau quartier vient de surgir de terre en quelques mois. Et ces agglomérations édifient leur église, leur hôpital, leur maternité, leurs écoles.
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CHAPITRE V - L'ORGANISATION MUNICIPALE La Ville d'Alep s'administre elle-même. Une Commission Municipale est chargée de cette mission. L'organisation municipale est déterminée actuellement par l'arrêté N° 160 bis du 10 juin 1925, portant organisation des municipalités des villes de l'État de Syrie dont la population dépasse 10.000 habitants. Cet arrêté fut modifié par l'arrêté N° 712 du 25 juillet 1927. La Commission Municipale comporte 13 membres nommés, parmi lesquels est choisi le Président de la Municipalité. Les sièges sont répartis comme suit : 1 grec orthodoxe syrien 7 musulmans syriens 1 maronite syrien (ou un arménien catholique) 1 grec catholique syrien 1 arménien orthodoxe syrien 1 israélite syrien 1 français Ce dernier membre représente les contribuables étrangers.
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