Nouvelle parution
Portrait de Jean-Jacqes Rousseau par le peintre Allan Ramsay
Rousseau (1712-1778) le célèbre philosophe et moraliste social franco-suisse porte le bonnet de fourrure et la veste bordée de fourrure de son costume arménien favori. Ce costume a suscité la curiosité de la société londonienne après l'arrivée de Rousseau en Grande-Bretagne en 1766. Ramsay a choisi un fond sombre qui met l'accent sur la lumière sur le visage et le cou de Rousseau, alors qu’il se tourne vers l'artiste et le spectateur. Les vues révolutionnaires de Rousseau sur la société, l'éducation et la religion lui avaient fait fuir la persécution par les autorités suisses et françaises. Ramsay a peint ce portrait en cadeau pour son ami David Hume, l'hôte de Rousseau à Londres.
Rousseau décida un jour de s’habiller en Arménien. Il déclara : « Et je ne portai plus d’autre habit ». Il était nécessaire d’examiner ce choix vestimentaire décisif à la lumière de l’œuvre, incluant l’expérience vécue et les lectures du philosophe, pour montrer que loin de ressortir au caprice ou à l’utilitaire, loin d’être anecdotique, l’habit arménien s’accorde avec l’univers de pensée de Rousseau. C’est l’habit qu’il habite.
Les différentes dimensions symboliques de l’habit arménien examinées par Chakè Matossian confèrent à ce choix vestimentaire une valeur de signe, éclairant les questions philosophiques et politiques cruciales aux yeux de Rousseau : l’immortalité de l’âme, le commerce entre les hommes. L’habit arménien recouvre le moi physique, imaginaire, musical et spirituel du citoyen de Genève, il lui procure l’aura du mage, l’animalise et le divinise tout à la fois. Seul l’habit arménien aura montré Rousseau dans toute la vérité de sa nature et l’aura désigné comme ce qu’il est : « autre ».