Janvier 2014 - Fraternité gréco-arménienne, deux ouvrages

Deux ouvrages de nos collections célèbrent l'amitié gréco-arménienne au lendemain de la Première Guerre mondiale. Ils relatent les discours prononcés au cours de réunions organisées à l'initiative de l'Union Intellectuelle Arménienne de Paris. Et Archag Tchobanian de s'exclamer : Une victoire radieuse a couronné la formidable lutte. L'esprit du Mal a subi la plus grande défaite que l'Histoire connaisse. En Occident comme en Orient, le Despotisme est terrassé. C'est bien l'aube d'une ère nouvelle qui sera celle du règne universel du Droit.
Mais c'était avant le Traité de Lausanne...

La Renaissance de l'Orient

Discours prononcés à la grande réunion organisée par l'Union intellectuelle arménienne de Paris et qui a eu lieu le 11 décembre 1919 à la Sall des Agriculteurs, sous la présidence de M. Denys Cochin, de l'Académie française
En vente au profit du Secours National Arménien

  • La Renaissance de l'Orient. La Victoire de la liberté et les irrédimés d'Orient, par M. Denys COCHIN. L'Arménie, avant-garde de la civilisation gréco-latine en Orient, par M. Archag TCHOBANIAN - L'Esprit touranien, par M. Bertrand BAREILLES. Grèce et Arménie, par M. Jean S. SVORONOS
  • Editions Ernest Leroux
  • 1919
  • Imprimerie Lang, Blanchong, Paris
  • 12 x 19 cm, 68 pages
  • Publications de l'Union intellectuelle arménienne de Paris

Discours de M. Denys Cochin

Mesdames, Messieurs,

Quand on avance en âge, on est heureux de retrouver les souvenirs ardents de sa jeunesse, de revoir vivantes des causes auxquelles on s'est toujours intéressé.

Il arrive souvent, surtout dans une vie politique, que les espérances qu'on avait conçues ne se sont pas réalisées, que des choses qu'on a admirées d'abord ont paru soulever quelques doutes ; on fait son examen de conscience, et on est heureux de noter des circonstances où il est bien certain qu'on ne s'est pas trompé.

Défendre la cause des Arméniens, avoir eu l'honneur de parler souvent pour une pareille cause, c'est certainement avoir rencontré une des circonstances heureuses où, quoiqu'il arrive, on peut être sûr d'avoir été dans le vrai, dans le droit, dans le juste (très vifs applaudissements.)

Nous nous retrouvons après quatre ans d'épreuves formidables, en une journée où ceux qui, comme moi, ont rencontré des témoins des fêtes qui viennent de se célébrer à Strasbourg, à Metz, à Colmar, ont vu des gens transformés par l'émotion et par la joie ; les caractères les plus calmes, les esprits les plus froids reviennent de Metz, de Strasbourg, de Colmar, tellement émus qu'ils ne peuvent vous parler, qu'ils ne peuvent vous serrer la main sans avoir la gorge serrée et la voix tremblante au souvenir de ce qu'ils viennent de voir.

Je ne crois pas que jamais un peuple ait donné, avec un pareil enthousiasme, le spectacle réconfortant du bonheur qu'apportent la délivrance et la liberté recouvrée. Ce sont des jours qui se comptent et qui sont très rares dans l'Histoire. C’est tout ce que l'on peut souhaiter de plus beau et de plus heureux.

Messieurs, ces belles journées que nous traversons nous engagent, plus que jamais, à suivre notre voie et nous attachent aux causes aussi justes, aussi généreuses que la vôtre, et qui doivent bientôt obtenir aussi leur triomphe.

Chaque occupation de l'esprit humain a ses loin particulières, sa morale spéciale. Dans la vie d'un savant ou d'un philosophe cette morale n'exige pas que l'on suive toujours la même voie Des découvertes imprévues peuvent imposer un changement de direction d’un esprit sincère.

Dans la vie politique, si l'on découvre qu'on s'est trompé, si l'on change d'avis, il faut se retirer, parce qu'on ne parle pas pour soi seul, mais pour ceux desquels on a obtenu la confiance.

Il faut donc marcher droit, dans la voie qu'on s'est tracée, et où l'opinion publique compte vous retrouver toujours.

Cette rectitude dans les actes ne s'impose pas seulement à un homme, mais d’une nation — une nation entière a un honneur, auquel elle tient, un drapeau qu'elle ne change pas.

La France a attaché son nom d la cause de la liberté, de l'autonomie, de l'indépendance des peuples; la France a déclaré au monde que toujours elle défendrait cette cause; la France est un chevalier errant qui n'en va trouver les opprimés — la Pologne, l'Arménie et ta Grèce - (car, il y a une partie de la Grèce qui n'a pas encore recouvré sa liberté) et qui leur dit: «r Je suis à vous ».

Eh bien ce rôle, il ne faut pas que nous y renoncions! (Très vifs applaudissements.)

Nous avons vu ailleurs dus gens habitués à ne croire qu'à la force et à l'intérêt. Nous avons vu des gens, élevés à l’école de leurs grands hommes, tels que Frédéric II qui disait : « Je prends d'abord: il se trouvera toujours un imbécile de jurisconsulte pour démontrer que j'ai eu raison ». Ils ont trouvé cela intelligent et spirituel.

Nous avons vu des gens qui ont érigé en dogmes les plaisanteries des cyniques faites pour étonner et amuser au besoin dans un salon. Les boutades d'un Nietzsche, ont été prises au sérieux par de graves jurisconsultes et de lourds guerriers, les Treistchke, les Dehring, les Bernhardi. Cela m'a toujours fait penser à la fable du petit chien et de l'âne.

Ces gens hautains donnaient des leçons aux petits esprits gui invoquent encore la justice et la vérité. Et qu’arrive-t-il, c'est que les petits esprits attachés à ces illusions ont triomphé, ayant été plus forts que les autres, qui ne croyaient qu'à la Force.

Restons donc, après ce grand enseignement de l'histoire, ce que nous étions. Continuons à marcher dans la même voie, soyons fidèles à la logique sévère qui constitue en politique l'honnêteté. Acceptons la belle expression italienne : Viva l'Italia irredenta. Acceptons-la en faveur de l'Italie. Mais n'oublions pas aussi qu'il y a une Grèce irredenta, une Arménie irredenta, et qu'elles ont les mêmes droits.

Vous me voyez ému, Messieurs ; l'émotion des gens que j'ai vus aujourd'hui, des gens qui revenaient de voir l'Alsace délivrée, m'a gagné. Et cette émotion, comme il est bien naturel, cette émotion profonde ne fait qu'enraciner davantage en moi les convictions que j'ai toujours eues ; le triomphe de mon pays ne fera, croyez-le bien, Messieurs, qu'unir la cause des Arméniens et des Grecs plus profondément à celle de la France.


La Fraternité arméno-grecque

Discours prononcés au banquet donné par les Arméniens de Paris, le 16 janvier 1919, en l'honneur de M. Vénizélos, Président du Conseil hellénique

  • La Fraternité arméno-grecque : discours de M. Archag Tchobanian, M. Boghos Nubar et de M. Vénizélos prononcés au banquet donné par les Arméniens de Paris, le 16 janvier 1919, en l'honneur de M. Vénizélos
  • Editions Ernest Leroux
  • 1919
  • Imprimerie Lang, Blanchong, Paris
  • 12 x 19 cm, 40 pages
  • Publications de l'Union intellectuelle arménienne de Paris
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